Royan autrefois

 

Mes ancêtres Massias, Prade, Millié et Feugnet ont habité cette cité balnéaire atypique de la Belle époque. Il en est resté quelques histoires, cartes postales de correspondance, photos et souvenirs. Les documents présentés sur cette page appartiennent à la famille Fournier / Juillet. Ils ont été répartis chez plusieurs membres de la famille. Quelques documents appartiennent à la famille cousine des Avrillaud, comme c'est indiqué dans les légendes. Pour les cartes postales l'année notée n'est pas celle de la photo mais de la correspondance.

 

Bains de mer et salles de bain

 

Royan fut d'abord un village de pêcheurs. Les premiers touristes venaient de Bordeaux en bateau à vapeur, puis le 28 août 1875 fut inauguré le chemin de fer reliant Paris à Royan.

Pierre Prade (1844-1914), un ancêtre, exerçait le métier de plombier-ferblantier dans les grands hôtels en construction à Royan, quand les bains de mer sont devenus à la mode. Il s'occupait des salles de bains de luxe avec des baignoires, qui étaient rares à l'époque. Pierre Prade, né près d'Angoulême, avait vécu son enfance à Mascara en Algérie. Il avait été appelé comme militaire de la garde mobile à Royan en 1870 où il a rencontré sa future femme puis il y a créé son entreprise en 1883.

facture de 1902 de Pierre Prade

facture de 1910 de Pierre Prade

Catholique, Pierre Prade avait épousé Juliette Millié (1847-1924), protestante. Leurs enfants furent protestants.

Juliette (Joséphine Chérie) Millié était née à Royan en 1847. Ses frères étaient marins à Royan. Son père Hyppolyte Millié, tailleur de pierre rue Rochefort, était né à Royan en 1806. Sa grand-mère, Marie Marguerite David, était née à Royan en 1765.

Le fils de Pierre et Juliette Prade, Jean Prade (1872-1958) a pris la suite de l'entreprise. Il a épousé Louise Feugnet qui avait passé une partie de son enfance à Buenos Aires où son père Royannais et son petit frère étaient mort de la fièvre tiphoïde, en 1890. Louise était revenue en catastrophe avec sa soeur et sa mère Laétitia Avrillaud (1855-1931) qui avait failli mourir de la fièvre à bord du bateau du retour, et qu'on avait failli jeter par dessus bord laissée pour morte, mais un marin l'avait heureusement retenu par la robe. Louise Feugnet était la nièce d'Henry Avrillaud dont on va parler dans le chapitre suivant. Henry Avrillaud avait d'ailleurs séjourné avec elle à Buenos Aires.

Facture vierge de Jean Prade.

facture de 1928 du frère de Jean, Hippolyte

Ce tableau a été offert à cette époque en remerciement des travaux effectués par un "M. Russe immigré"

Cet Atlas mondial de 1872 a été offert à ma grand-mère Suzanne Fournier par la gouvernante africaine de M. Simon, ami d'enfance de son grand-père Prade. M. Simon, quand il n'était pas en voyage dans les ambassades d'Asie et d'Afrique, habitait la villa Hélios en haut de la rue du Château d'eau. Aujourd'hui à cet emplacement il y a une résidence des années 1970. "Il ne descendait pas la rue du Château d'eau sans s'arrêter au n°6, là où se trouvait le magasin de sanitaire et appareils de chauffage de mes grands-parents, pour les saluer." Sur ce plan de Royan de 1877 la rue se nommait alors rue de Bel-Air.

Les Prade vers 1909. En haut : Louise Feugnet et son mari Jean Prade. Hippolyte Prade et sa femme. Au centre : Pierre Prade à gauche et sa femme Juliette Millié à droite. En bas : Louisette Prade et ses cousins Prade. Maison de Royan, probablement rue du Château d'eau.

Même photographie colorisée (les couleurs peuvent être inexactes) par Clélia Billiard

 

Le Casino

 

Il faut savoir qu'à cette époque deux casinos importants existaient proches l'un de l'autre. Le Casino de Foncillon a été terminé en 1885 et le Casino Municipal (le plus grand de France) fut inauguré le 1er août 1895. Un frère d'une ancêtre, Henry Avrillaud (1869-1954), y était en saison (été) contrôleur au jeu du baccara. C'est lui qui est présent sur les photos ci-dessous (source famille Avrillaud), sauf à priori sur la carte postale. Jean Prade, l'ancêtre ferblantier décrit dans le chapitre précédent, y était pompier de garde dans sa jeunesse. Il entendait les opéras qu'il connaissait par coeur et qu'il chantait ensuite à la maison.

Guide Joanne-Bains de Mer de l'Etat en 1899, chapitres sur Royan : Renseignements pratiques, Guide touristique

 

Royan - Le Casino : Entrée de la salle de Baccara

 

Années 1900 et 1910

 

Royan (sans date)

Royan - L'estacade à mer basse (1902)

Royan - Le Casino Municipal - Le Jardin - photographe Novozelski (1903)

Royan - Vers la promenade Botton (1907)

école de filles de Royan vers 1910 (Louisette Prade à droite), certainement l'école Jules Ferry inaugurée en 1907 et située 18 rue des écoles

Royan - La Grande Conche (signifie plage) (1912). On peut voir le Casino Municipal au fond

Royan - Le Casino de Foncillon (1914)

Royan - Groupe de baigneurs (1916)

Royan - Casino et façade de Foncillon (1916). On peut lire sur le tramway : Fantaisies parisiennes - Toutes nouveautés - Mieux à meilleure marque

Royan - Pontaillac - Arrivée du tramway (1916)

En Cherente : à la mode (1916)

Saint Palais sur Mer - Le Bureau - La plage (1916). Au nord de Royan, non touché par le bombardement.

Bureau - Saint Palais - Le Pont de la Corniche (1916). Chemin des douaniers

Bureau - Saint Palais - Les Pierrières (1917). Chemin des douaniers

Le 29 mars 1917, un navire norvégien s'échoua sur le banc de sable près du phare de Cordouan. Il était chargé de 4000 tonnes de sacs de farine qui furent retrouvés les jours suivants le long de la côte. La population avait été autorisée à récupérer la farine sur la plage, et Louisette Prade (1899-1991) utilisait cette farine en confectionnant le gâteau suivant, pour suppléer à la ration de pain : 4 tasses de farine, 2 tasses de lait, 1 tasse de sucre, 1 paquet de sucre vanillé, 1/2 paquet de levure Alsa. Sa grand-mère Prade avait besoin de 3 rations de pain : la sienne, celle de sa fille et celle de Louisette. Louisette et sa mère remplaçaient le pain en outre, par des pommes de terre bouillies, ou en "robe des champs".

en savoir plus

Un été à Royan vers 1919 avec Louisette Prade et ses amis. D'abord probablement à Saint Palais de la plage du Bureau au Pont du Diable en passant par le sentier des douaniers aux Pierrières. Puis probablement au Square Botton de Royan :

 

Années 1920 et 1930

 

Les bains de mer - La pêche aux crevettes (1921)

La cousine Andrée écrit probablement à Pierre Massias. Elle parle de Café des bains à Royan où l'on danse les nouvelles danses : Tango, Boston, Fox Trott.

Autre anecdote, Louisette Prade, qui travaillait depuis 1914 comme receveuse aux PTT de Royan, se souvient en mars 1922 avoir établi la communication téléphonique avec le bureau des Ponts et Chaussées pour annoncer l'accident mortel d'une relève au phare de Cordouan : L'ingénieur des Ponts et Chaussées Menu et 3 matelots eurent leur canot renversé par la mer alors que, chargés de provisions, ils rejoignaient le phare depuis leur bateau la Quinette. Menu et un matelot furent emportés par les flots.

Charente inférieure - Saint Palais sur Mer - Arrivée du tram de Royan et départ de celui de la Coubre et du Galon d'Or - Si vous venez à Royan faites une excursion par le tramway forestier (1922)

Royan - Les rochers isolés à Vallières (1925). Maintenant Boulevard de la Corniche à Saint Georges de Didonne.

Royan - Groupe de baigneurs (1928)

Pontaillac-Royan - La plage (1928)

Probablement la pointe de Suzac avec vue sur le phare de Vallières à Saint Georges de Didonne vers 1921. Avec Guy Massias (1900-1965) et Louisette Prade.

 

Pendant l'entre deux guerre, un photographe proposait aux baigneurs contre monnaie une photo de groupe souvenir sur la plage de Royan.

 

plage de Royan en 1927 (Suzanne et sa grand-mère Prade née Feugnet)

plage de Royan en août 1928 (Suzanne, sa mère et sa tante)

plage de Royan en 1933-1934

Suzanne Massias (1925-2015) passait toutes ses vacances chez ses grands-parents maternels Jean et Louise Prade à Royan où elle prenait des bains de mer. Elle devait entrer dans l'eau habillée en costume de bain et devait revenir au bout de 10 minutes et se changer aussitôt sous la tente de plage. Son grand-père Prade lui faisait monter un âne sur la plage. Ils allaient parfois plus loin à Saint-Georges alors zone sauvage, en cariole tirée par un vélo.

Extraits "Souvenirs de Royan" volume 1 (Droits d'auteur : François Richet)

 

Photos de famille de Suzanne Massias à Royan vers 1931-1932 :

 

Reine et ses Choros-choros (chiens chinois). Suzanne et ses chiens Bobette et Kiki sur la plage de Royan, un jour de vent

Baignade et rigolade. Louisette Prade et sa cousine Madelaine Boursier

 

En route pour Cordouan en juillet 1932 - Louise Prade, mère de Suzanne Massias :

 

Plage de Suzac - Suzanne Massias avec grand-père Jean Prade en juillet 1932. Située à Meschers, au sud de Royan.

Suzanne Massias devant le Casino Municipal en 1936

Port de Royan dans les années 1930. Au centre, on reconnaît le Café des Bains et ses stores.

Même époque. La jetée de Royan.

Royan (1932). On peut lire sur le panneau à droite : Grand concours des plages - Journal Mr Matin. Au fond, le paquebot L'Atlantique qui reliait Bordeaux à l'Amérique du Sud.

 

Années 1940 - 1950

 

Après la défaite et l'Armistice du 22 juin 1940, les Allemands ont pris possession de Royan le lendemain dimanche 23 juin.

Suzon Delafoy, amie de Suzanne Massias, raconte l'arrivée des Allemands à la Poste de Saint Palais, commune voisine de Royan au nord :

Puis Suzon raconte le début de l'occupation à la maison :

En 1942 Suzanne Massias avait 17 ans et prenait ses cours à la villa Les Palmiers à Royan qui accueillait les filles. Le collège/lycée accueillait beaucoup de réfugiés de l'est de la France et Suzanne raconta qu'un jour des Allemands sont venus interroger les élèves à propos de certains professeurs que Suzanne n'a ensuite jamais revus. Dans le témoignage ci-dessous, elle parle de ses amies Paule Calmette, Janine Kuhnn et Sylviane Allin. Et des professeurs disparus au printemps 1942 Mme Guibillon (français), Léonce Laval (latin) et Robert Dartagnan (dessin).

Extraits "Souvenirs de Royan" volume 2 (Droits d'auteur : François Richet)

Partie basse d'une carte d'identité réalisée en juin 1941 par le Ministère de l'Intérieur - Ville de Royan (Source : Famille Avrillaud)

Le 5 janvier 1945, Royan fut bombardée et détruite à 80 %. Les ancêtres Prade, qui avaient évacué avec très peu de biens quelques mois avant sous la pression des Allemands, furent sinistrés.

Ils s'étaient réfugiés chez une tante à Pons. Dans la camionnette de leur gendre Guy Massias, les Prade n'emportèrent que l'argenterie, les draps, les outils de plombier de Jean, la chaise en osier et le nécessaire à couture de Louise.

 

Photos suite au bombardement prises par la famille Massias le long du Boulevard :

 

Cette dernière photo représente les ruines du Casino Municipal.

 

Photo collection famille Avrillaud (cousins des Massias) :

Le front de mer semble à droite, l'église Saint Pierre au fond à gauche, et la rue en premier plan est peut-être la Grande rue (aujourd'hui rue Gambetta). C'était la rue du Temple protestant.

 

 

Les ruines de Royan furent libérées le 16 avril 1945.

Suzon raconte la mort d'un Allemand lors de la libération de la poche de Royan :

Peu après la libération de Royan, Suzanne Massias, petite fille de Jean Prade, et son amie Suzon allèrent en vélo arpenter les ruines au nez et à la barbe des soldats français, car la zone était interdite. Elle qui était étudiante en pharmacie fût étonnée de découvrir l'équipement médical que possédaient les Allemands dans leur blockaus du Chay.

 

La reconstruction de Royan était décidée. Et il fallait aider les Royannais sinistrés à revenir :

 

Nouvelle République du Centre Ouest

 

Communiqué aux sinistrés de Royan d'Emile Couzinet : page 1 et page 2.

 

 

Contrat d'usage de mobilier provisoire daté du 26 février 1946

Nouvelle adresse de l'atelier de Jean Prade à Royan

Agence de Pontaillac : Proposition de rachat du commerce de Jean Prade en 1946

Carte du Syndicat des propriétaires de Royan en 1948

Obus géants devant Le Mirado vers 1948, établissement de bains au bord de la plage de Royan, reconstruit en bois peu après la guerre, puis en dur en 1950 et rebaptisé Le Tiki en 1969. Source : famille Avrillaud

 

Royan avant / après le bombardement

 

Flèches rouges : Emplacement des maisons des ancêtres Prade 6 et 14 rue du Château d'Eau. Ils habitaient au n°6.

Flèches vertes : Emplacement des 2 appartements/maisons 10 et 12 Avenue des Congrès (dont un local commercial) attribués à la famille Prade lors de la reconstruction.

Source : IGN Remonter le temps

Jean et Louise Prade ne purent jamais profiter de leurs appartements/maions construits fin 1959 et attribués le 2 mai 1961, leur fille Louisette épouse Massias en héritera.

Ma grand-mère Suzanne Massias épouse Fournier a toujours cru que les maisons détruites de ses grands-parents se situaient au niveau du parking actuel de la nouvelle cathédrale, mais d'après le document suivant elles étaient situées à l'angle des rues actuelles Rue des Bains / Rue Paul Dyvorne.

On y découvre également ques les 2 appartements/maisons de compensation sont dans la cour du Temple détruit. Je ne sais quelle impression cela devait faire à Jean Prade qui avait été élevé dans la religion réformée, quoique rebaptisé catholique à l'âge de 60 ans (vers 1932).

 

21 juillet 1937

8 juillet 1945

16 mai 1964

superposition de l'ancien plan cadastral et des nouvelles rues. Source https://www.c-royan.com

Photographie aérienne des maisons Prade en 1920. Ils vivaient au n°6. Source IGN Remonter le temps.

La cuisine étant au dessus de l'atelier, les odeurs désagréables de soudure au plomb y montaient. La chambre leur petite fille Suzanne était sous les combles et était infestée de moustiques l'été

Situation approximative du 6 rue du Château d'Eau le 20 mars 1920 vue du Sud vers le Nord. Source IGN Remonter le temps.

Même photographie en gros plan

Situation approximative du 6 rue du Château d'Eau le 20 mars 1920 vue de l'Est vers l'Ouest. Source IGN Remonter le temps.

Même photographie en gros plan

Temple protestant de Royan : Les maisons Prade n'était qu'à environ 30 mètres à droite et les nouveaux appartements/maisons seront dans la cour arrière gauche du Temple. Source Erick Mouton

Vue des maisons et du temple en ruines le 7 août 1946. Source IGN Remonter le temps.

Superposition d'une vue aérienne de 2022 avec les parcelles des maisons Prade. En vert les appartements/maisons de compensation. Source Geoportail

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